Pour faire le tour du Massif des Écrins au départ de Bourg d’Oisans (Isère – Hautes-Alpes) par le GR 54, j’ai marché sur 200 km pendant 10 jours et gravi cette fois au total 12 000 mètres. Bien accompagnée et boostée par ma fille Gaëlle et Dominique un ami trailer, j’ai battu mes petits records sportifs sur cette randonnée que nous entamons en août 2020.
Nous avons choisi nos étapes et réservé les hébergements par nous-même, dès que cela a été possible, tout juste sortis du 1er confinement.
- Le Bourg d’Oisans – Clavans-en-Haut-Oisans (22 km – 7h – 1500 m D+)
- Clavans-en-Haut-Oisans – La Grave (Gîte le Rocher) (15 km – 8h – 1300 m D+)
- La Grave – Le Monetier les Bains (Gîte Le Flourou) (26 km – 9h – 1100 m D+)
- Le Monetier les Bains – Vallouise (Gîte l’Aiglière) (21 km – 8h ¼ – 1560 m D+)
- Vallouise – Refuge du Pré de la Chaumette (16 km – 1100 m D+)
- Refuge du Pré de la Chaumette – Refuge Xavier Blanc (14 km – 7h45 – 1260 m D+ – 1610 m D-)
- Refuge Clot – Refuge des Souffles (17 km – 5h30 – 1000 m D+)
- Refuge des Souffles – Valsenestre (23 km – 9h1/4 – 1660 m D+ – 2300 m D-)
- Valsenestre – Refuge de la Muzelle – 9 km – 5h1/2 – 1293 m D+
- Refuge de la Muzelle – Bourg d’Oisans (20 km – 500 m D+ – 1900 m D-

A la description chronologique de chaque étape, je préfère partager ici les moments qui m’ont le plus marqués sur ce tour.
Clavans-en-Haut-Oisans : à l’Auberge du Savel, le tout nouveau gérant nous sert le petit-déjeuner du sportif à base de croissant, tartiflette, omelette, tarte aux prunes et faisselle … tout cela au lever du lit ! Je vous épargne la photo et vous laisse imaginer … Du jamais vu !! Elle commence bien cette randonnée 🙂
Besse, un joli village tout en pierres et en pavés. Dans des endroits tels que celui-ci, on se fait surprendre par le charme authentique de la France grâce à tous ceux qui ont à cœur d’entretenir le patrimoine historique.

Dès le 2ième jour, vue XXL sur le glacier de la Meije depuis le col du Souchet et la poursuite en balcon vers La Grave.

Le lac du glacier d’Arsine puis le col d’Arsine et ses incroyables lacs blancs. La couleur laiteuse des lacs et rivières est due à la présence de paillettes minérales en suspension dans les eaux en provenance de l’érosion glaciaire.
De Le-Monetier-les-Bains à Vallouise, nous empruntons une déviation par le col des Grangettes : la journée a un goût d’aventure … une belle escalade de 80 mètres avec main courante nous attend avec son cortège de sensations et d’adrénaline. L’arrivée est à la hauteur de nos émotions : le col est un étroit passage duquel on profite d’une vue plongeante sur le sublime lac glaciaire de l’Eychauda à 2514 mètres, surplombé du glacier.




Vallouise station village, la Chapelle de Valgaudemar et Valsenestre sont les étapes pittoresques du tour, avec leurs vieux chalets et vielles fermes. Qu’ils soient retapés ou encore dans leur jus, je porte un œil attentif aux matériaux. Ici rien d’artificiel : pour résister au climat hivernal, il n’y a rien de plus durable que le bois et les pierres.

Le col de l’Aup Martin, point culminant du GR 54 : un passage vraiment délicat sur un sentier bien étroit et glissant, couvert de fins morceaux de schiste. Les bâtons sont les bienvenus pour passer les éboulis instables. S’en suit la descente par le Pas de la Cavale en direction de la Vallée du Champsaur, un nom évocateur de souvenirs d’enfance.




Le refuge du Pré de la Chaumette et sa rivière pour un repos et une toilette très nature. Les douches du refuge ont été fermées pour ne pas avoir à les nettoyer en cette période de pandémie : c’est rageant mais on apprend à lâcher-prise. On est déjà très heureux d’être ici.



Le refuge des Souffles et son légendaire accueil bourru : notre réservation n’a pas été prise en compte. Fort heureusement, un désistement de dernière minute nous permet d’obtenir une place en dortoir. Au pire, ils nous auraient donné une tente. Le refuge est plus que plein : les distanciations ne sont pas respectées ici, ni à table, ni dans les dortoirs. Et pourtant, là aussi, la douche est condamnée … en réalité elle est devenue payante pour dissuader de son usage.
Le refuge de Vallonpierre et son lac croquignolet au pied du Sirac. Le lac est parfaitement baignable. Une bien agréable étape pique-nique les pieds au frais pour nous.


Le 8ième jour, 2 étapes en une, du refuge des Souffles à Valsenestre avec ses 2 cols et ses 23 km parcourus en 9h1/4, ses 1660 m D+ et ses 2300 m D-. Me retourner et voir tout au loin le col par lequel on est passé et l’ascension réalisée me procure une immense satisfaction et le sentiment d’être heureuse.




Le col avec la vue plongeante sur le lac de la Muzelle. L’étape est courte mais elle est marquée par la rencontre d’Alice, une copine de la fac de médecine et de master de Gaëlle qui parcourt un bout de route avec nous. Je me souviendrai toujours des chaussures d’Alice, des Vans en fin de vie, même pas mettables en ville et de son sens de l’autonomie : Alice a un gros sac de couchage et dort à la belle étoile ! Je me souviendrai également de l’appel de l’ARS pour m’apprendre qu’il y a 4 jours, nous avons été potentiellement en contact avec la Covid au refuge du Pré de la Chaumette. On nous demande de nous faire tester au plus vite : comment dire … impossible de faire plus vite que la vitesse de nos pas !







Le lever du soleil au col du Vallon au-dessus du refuge de la Muzelle avant d’entreprendre une très longue descente vers le Lac du Lauvitel : que d’étapes baignables sur cet itinéraire !

De gîtes en refuges de montagne, cols après cols, j’ai embrassé du regard des pics enneigés, des glaciers éphémères, des lacs glaciaires aux couleurs tantôt blanche tantôt turquoise. J’ai sué et pesté dans des pierriers en pleine canicule ; j’ai vibré dans des sentiers en balcon d’où je pouvais voir le tracé de mon chemin sur le flan opposé droit devant moi. Je me souviendrai de tous ces lacs et rivières où nous avons pu nous rafraîchir la tête ou les pieds.
Quand je regarde vers où je vais, je ne me pose pas de questions : j’avance tout simplement. Quand je me retourne et que je regarde le chemin parcouru, je suis heureuse, je me sens bien là où je suis, fière de moi, libre, solide. Au plaisir de la randonnée et de la bonne compagnie s’est rajouté cette fois-ci le sentiment de dépasser mes limites. Merci Gaëlle et Dominique de m’avoir attendue en haut de chaque col !

